27 avr. 2011

KING KHAN & the SHRINES + DUM DUM GIRLS + YUSSUF JERUSALEM | 24/04/11 | @ LA MACHINE DU MOULIN ROUGE

MUSIQUE : CONCERT

Ce weekend de pâques j’étais, selon toute vraisemblance, au concert to be.

Cela devait faire à peu près un quart de siècle que je n’avais pas foutu les pieds à la machine du moulin rouge, et pour cause : programmation déplorable, soirées à thème pour jeunesse ne quête d’identité. Mis à part une ou deux exception, les concerts parisiens ne m’avaient de toute façon plus tentés depuis 2005. Période géniale avec son lot de petits groupes indés au batofar ou à la boule noire, les soirées étaient alors dantesques et on allait encore au truskel pour y danser, parce que c’était crade, que ça puait la sueur et les fins de soirées prometteuses en rencontres bizarres.

Bref, 2011, me voilà de retour aux sources. Ce dimanche 24 avril, un car entier de laotiens fait la queue devant le moulin rouge. Je repère une blonde à la coupe très structurée accompagnée d’un tatoué en Sebago : indice minuscule et pourtant significatif de ce qui se déroule ici, à coté du fourre-tout touristique.

Le videur m’avertit que l’appareil photo, ça ne va pas être possible : « Ils sont chauds ce soir ». Et, au moment de montrer mon billet acheté 1h avant, l’organisateur clôt le débat : « vous allez déposer votre appareil au vestiaire et après vous venez me taper sur l’épaule pour me prouver que c’est fait.
-          Et si je ne viens pas ?
-          Je vous traque. »

Passage rapide aux vestiaires, tape à l’épaule puis je m’engouffre. A l’intérieur il fait sombre, moite, humide, une fausse fumée rappelle l’ambiance des bars où la clope était permise d’antan. Je suis nostalgique. Déjà un couple de trentenaires se bécote sur les fauteuils du mini club avant la scène. Une ambiance de boum rétro.

Yussuf Jerusalem (Fr, born Bad) joue au fond. Je pense « trop de reverb ». Des maladresses qui ne sonnent jamais comme du maniérisme qu’ils disaient sur l’évent facebook, moi j’appelle ça des fausses notes. Ca se place, une signature digne de Born Bad, égale à eux-mêmes. Je ne fais pas trop attention au son, je préfère me focaliser sur le public. Assez surprise il s’avère très éclectique. Du frérot de bonne famille aux gosses tatoués issus du xhardcorex du début des années 00’s.

Un dandy edwardien semble flotter sur le parquet brut. Bon sang, que fait-il ici ? Ce vampire néoclassique solitaire sorti tout droit de Second Life est comme un rêve, il n’appartient pas à ce monde et très vite je le perds de vue.

« La prochaine c’est pour les petits gars du 18ème ». Pour du garage, ça sonne vachement métalo-ramsteinien quand même. « Celle là, encore plus pour le 18ème », me rappelle vaguement les années 2000. Depuis quand le 18ème est-il devenu un arrondissement hardos ? Où ai-je loupé le coche ? Moi je l’associais plus à Gondry et à ce qu’on appelle la puante nouvelle vague. Mais bon, ça fait 10 ans que je n’ai pas écouté la radio aussi.

Je frôle une conversation anglophone « the singer is from canada » et descends dans la fosse, bière à la main. Deux chevelus sortent des loges à gauche de la scène, lookés rock glam 80’s mais pas trop, à la guns’n’roses. Décidemment les groupies sont partout « saluuuuuuuut » langoureux en direction des boys. Je me retourne, ça pouffe, gênées et sans doute puériles. Et de nouveau « saluuuuuuuut » avec un regard en biais pour moi. Enfin pas pour moi. Peut-être pour vérifier si j’écoute ou j’observe. Ca oui les filles, j’observe, allez-y gaiement. Je vous détaille sous toutes les coutures si bien que vous pourriez vous retrouver à poil.

Dans la fosse, il y a de tout. De la blonde peroxydée zéro style, à l’ultra lookée pute vintage. Des échos 90’s a cheveux longs, des rasés Fred Perry 00’s, des chemises à carreaux-beaucoup, un jeune preppy « bermuda, petit polo et sacoches bandoulières », pas de doute, tout Paris est à sa porte… Des relans d’emokids qui approchent la trentaine et pas mal de barbes de 3 jours. Tout-à-coup je me demande « me prennent-ils pour les stups ? Ah bon, ce n’est pas un concert reggae ?! » pas que je j’ai l’air hippie, mais bon je me suis fringuée comme si j’allais à un vernissage.

Après environ une heure d’attente les américaines de Dum Dum Girls (US, Sub Pop) sont sur scène. C’est l’hystérie. Public féminin en masse, pour rockeuses en collants à motifs. La minijupe s’impose, noire, courte, et pas vraiment avantageuse. J’entends « elles sont molles du poignet ». Moi je trouve que c’est efficace et agréable à écouter. Retro, rock’n’roll un rien féministe. Guitariste de gauche, une gothique dont le style consiste à tirer la gueule. Rouge à lèvre noir oblige, faudrait pas qu’il craquelle sous les spot lights.

Quatre franges longues, trois brunes, une rousse – la plus jolie. Seul hic, on dirait qu’elle s’emmerde. A-t-elle rompu son contrat ce soir ? « Allez les filles, c’est ma dernière. Je raccroche. Et toi l’asiat derrière, tu ne m’en empêcheras pas. » Les autres à peine moins potiches déhanchent leur guitare en rythme pendant qu’au fond, la dernière utilise 4 éléments de sa batterie de 10. Une chinoise en haut dans les gradins semble connaitre les paroles par cœur. A la vue de vue de certaines personnes dans la fosse ce n’est pas la seule. J’essaie de bouger. Impossible, alerte au barrage lesbien. Après bien 20 minutes je sors enfin de la fosse.

Une gueule d’ange  tout droit sortie de collège passe devant moi. Je l’avais remarquée depuis mon arrivée. C’est le prototype de votre copine des années 90. Chez moi elle s’appelait Caroline et avait toujours des 16/20. Elle est blonde, une vraie, pas du tout en mode fashion. Coupe au carré de nos mamans de bonnes familles, un t-shirt noué au dessus du nombril, un minishort et des sandales en bois. Je me crois à une happy boume de mon enfance. Et décidemment, je fais vraiment parti des stup. « Ah bon, c’était pas un concert rock ?! »

Grand défilé dans le couloir qui mène à la sortie. Les putes vintage se barrent. Mais que reste-t-il dans la fosse pour la tête d’affiche ? Des américaines ont acheté des vinyles. Prennent en photo le fumoir avec leurs blackberrys. Un photographe pose sa mallette professionnelle à mes pieds, range son matériel. Peut-être cherche-t-il à communiquer ? Le public a tout à coup moins de 20 ans. Mais où étaient-ils cachés ? Enfin j’aperçois Paris tel que je le connais, et puis, c’est déjà fini. Et puis, les looks sont tous plus insatisfaisants les uns que les autres. C’est donc une ode aux chapeaux rabbi Jacob détournés en sorte de canotiers noirs un poil baby rock. Tenue total look jean. Une ode aux Doc Martens.

Je file une dernière fois, sur les gradins regarder la fin du concert avec les très attendus King Khan & The Shrines (US / CA, Vice ). C’est pro, rythmé, dansant, foisonnant, émoustillant, gargarisant, foutrement jouissif. L’atmosphère s’en ressent moins superficielle, plus détendue, dans le vif et le vrai des choses pour une seule contrainte : se lâcher totalement. Et tout ce  petit public éclectique danse en faisant fi du qu’en dira-t-on. Il fallait vraiment qu’un indien remette de l’ordre dans tout ce merdier. Bon dieu il était temps.

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